vendredi 19 octobre 2018

Animalis de Claire Varin




Il y a des livres qui transforment le regard humain sur les bêtes. C’est à Banff Centre, lors d’un séjour d’écriture, que l’auteure Claire Varin ira chercher à apprivoiser l’écriture « animale ». L’autre bête qui dort en elle. En l’occurrence, l’écriture anglaise. Se réconciliera avec les guerres de ses ancêtres. S’approchera au plus près de la voix et de la voie animale. Le grognement de l’ours ou du loup (son « duende » intime). Animalis est un essai sous forme de récit autobiographique. Les épisodes où elle décrit son père en train de chasser un rat ou les passages où elle subit des rituels vaudous au Brésil, d’une prose précise et juste,  révèlent les premières prises de conscience vers la voie végane que prendra l’auteure. Avec elle, tout le long du livre, on voyage dans les parcs nationaux du Canada pour aller à la rencontre de la faune sauvage. On assiste à l’horreur de la maltraitance animale, autant qu’à la naissance de la vie, d’un éléphanteau, qui ne se fait pas sans la frayeur de sa mère qui craint ne pas le voir respirer. On est témoin de la torture et du sadisme de l’homme pour dominer la nature. Le chemin est long avant l’abolition des élevages industriels. L’animal est l’égal de l’homme pour Claire Varin. Il n’est pas acceptable qu’il soit hiérarchiquement inférieur. Elle se porte à leur défense et pour la libération des animaux de leur servage. Cela nous pousse à réfléchir comment pour humilier les Noirs, par exemple, on les compare, ou on les traite, en animaux.  Avec elle, on ira à la rencontre des vaches, des chiens « voyants et sourciers », des renards, des dauphins, des lions, et des grizzlis… C’est quand Claire raconte ses récits intimes, la mort de ses chats ou sa réflexion sur la vie animale, que nous sommes touchés par l’aspect littéraire du récit. Les bêtes ont un nom, et donc une identité, Frimousse, Chico… « Aimez-moi » semble implorer le chat … « à qui raconter ça ? » continue la narratrice. C’est l’essence de l’ouvrage. Qui va recevoir sa complainte ? Il est difficile, encore aujourd’hui de convaincre les gens et leur dire que les animaux nous parlent sans se faire traiter de folles, de sorcières, et pourtant c’est de la clairvoyance. Claire est une voyante des temps modernes. Après avoir fermé le livre, on ne regarde plus la vie animale, végétale, que dis-je, la vie tout simplement, de la même manière.



Animalis de Claire Varin, Leméac, 2018.

dimanche 7 octobre 2018

Le Livre d'image de JLG






Le Livre d'image de Jean-Luc Godard. Une fresque testamentaire qui mêle autobiographie et histoire du cinéma. Un maelström poétique d'images entrecoupées d'explosions qui imposent le silence. C'est exactement cela que nous vivions pendant la guerre. Une explosion qui arrête brutalement tout discours.  (Je réfléchis encore combien la douleur de Godard envers l'injustice rendue au monde arabe est vive dans son film). Et la parole reprend : la voix de JLG, fatiguée. Film théorique. C'est son Théorema. Un hommage au cinéma de Dziga Vertov. Une leçon de montage. Et surtout une forte dénonciation de l'Occident." Sous le regard de l'occident" vient ponctuer la toile. Parce que c'est une peinture dénonciatrice qui prend des tons bibliques : le Livre. C'est le livre des trois grandes religions aux mains tachées de sang. Chaque images, ou segment de film, est chargé de sens et renvoie, fait écho, dans l'esprit du spectateur à de multiples autres
références, et cela à l'infini. Si infini il y a. Le livre c'est l'Esprit des lois de Montesquieu, c'est l'esprit d'une image, ou bien encore l'âme d'une image. Une réflexion sur la mort, Le mouvement et l'absence de mouvement. Une théorisation extrême, une poétisation extrême, barthésienne. Une abstraction. Loin de toute fiction. Un documentaire extrême

Chant des créatures de Nadine Ltaif

CHANT DES CRÉATURES, le nouveau recueil de NADINE LTAIF sort en librairie aujourd’hui mardi, le 6 février 2024. « Pour écrire un seul vers, ...