samedi 20 janvier 2024

Chant des créatures de Nadine Ltaif




EN LIBRAIRIE LE 6 FÉVRIER 2024 
Le 4 août 2020, une explosion inouïe dans le port de Beyrouth cause des milliers de morts et de blessé·es, détruisant toute matière vivante en un souffle. Comment se reconstruire à partir de ruines ? Que résiste-t-il dans les souterrains de la mort ? Dans Chant des créatures, la poète libano-québécoise Nadine Ltaif trouve réparation dans l’écoute de la nature et des êtres vivants qui se défendent sans voix. En hommage au poème « Cantique des créatures » de saint François d’Assise, le recueil s’adresse aux arbres et aux oiseaux comme des adelphes de l’humanité, créant un herbier où dialoguent les plantes du Liban avec les fleurs sauvages du Québec. 

Une oeuvre de Pamela D. Stewart en couverture 

Salon du livre de Québec 12 avril de 15h à 16h et 13 avril de 11h à 12h.
Salon du livre de l’Outaouais pour une signature le 24 février de 11h-12h et le 25 février de 13h-14h.

En France le livre est disponible à la librairie du Québec, 
39 rue Gay Lussac, Paris 5 

https://lenoroit.com/poetes/nadine-ltaif/ https://lenoroit.com/produit/chant-des-creatures/



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La vie sous terre revoit le jour. Les fourmis – longtemps
confinées – ressortent et viennent me saluer de leurs antennes
– Moi – la géante – gargantuesque – bienveillante. Elles savent
que je suis une des leurs – et ne leur ferai aucun mal.
J’attrape le soleil entre mes deux mains comme une balle de feu
je suis prête à bondir – les piles rechargées.
Rien n’a encore poussé autour de moi.
La vie souterraine s’active en secret.
Les chiens – fous de bonheur – arrachent les bras de leur maître.
Les derniers froids fondent au soleil.

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LE TOIT DU MONDE
Le Toit du monde se réveille. Déjà les oiseaux discutent de l’état de la planète
une brise fraîche revigore
les fleurs qui attendent leur dose de lumière.
Le ciel bleu tranquille
les hirondelles crient leur désarroi.


Lettres Québécoises no 193 été 2024




Le Devoir, 10 février 2024
Il faut relire Le cantique des créatures de saint François d’Assise, auquel Nadine Ltaif se réfère expressément, pour mieux saisir la compassion présente dans ses textes. Bien avant le témoignage de sa colère et ce qu’elle pourrait engendrer de dure plaie à l’âme, la poète aime, s’immisce dans le coeur du vivant, entre les oiseaux et les fleurs. Cela peut sembler bien loin de la tragédie de l’explosion dans le port de Beyrouth, qui, pourtant, est le centre révolté de cette oeuvre. « Comment survivre à l’horreur ? » C’est justement à travers cet appel à la nature que la poète trouve l’espoir : « Nous serons frères et soeur à la manière / de saint François », dit-elle, et c’est comme lui, dans son Cantique, qui se donne « par l’air et le nuage et le ciel serein et tout temps ». Ltaif, devant la tragédie, se transforme : « Ce jour-là, j’ai décidé de / me défaire de ma peau / pour devenir vivante […] // Sans faculté de jugement moral — / pour retrouver le goût sauvage / du vent et le bruit / qu’il fait dans les arbres. » Son écriture est belle et efficace.
Hugues Corriveau
Chant des créatures
★★★
Nadine Ltaif, Éditions du Noroît, Montréal, 2024, 88 pages
« Nadine Ltaif, au Noroît, publie Le chant des créatures. Ce recueil de poésie, qui pourrait tout aussi bien relever du recueil d'essais poétiques, nous convie à un exercice spirituel de détachement de la seule humanité pour retrouver un tant soi peu ce par quoi nous participons de la faune, plus souvent ailée, et de la flore, telle qu'une citadine peut en cultiver la présence. C'est pourtant l'évocation d'un Cerf entraperçu qui, à mon sens, me communique le mieux ce processus thérapeutique d'un esprit blessé par l'éloignement du pays, le souvenir de gens meurtris ou la pensée qu'ils le soient. Mais le temps d'attention porté à des plantes ou au passage d'oiseaux réitère cette occasion de donner une chance à ce qui s'affirme vivant alors même que des pensées de désastre, de stupeur devant la violence humaine, de blessures diverses pourraient vous transformer en mort.e vivant.e. Mais c'est bien l'espérance humaine de l'auteure que je discerne dans cette manière d'accueillir l'araignée sur sa toile comme une artiste/proie possible, guettant la possible présence d'un prédateur plutôt que comme la prédatrice fonçant sur sa proie emmêlée dans les fils de soie. Bien humaine cette convocation de divers textes souvent haïkus, dont l'un de poète préféré, Issa, et, pour le titre, à un écrit de Saint-François. En mots simples, Nadine Ltaif nous convie à respecter la complexité de ce qui se dit en un regard avec une bête, un toucher avec une plante. Se rappeler que le souffle passe, au moment même où la peur et la peine semblent nous vouer à disparaître. Réapprendre à être au contact de ce qui vit, le regarder comme s'il nous envoyait des signes: mais ne projetons-nous pas nous-mêmes sur ce qui se meut notre propre besoin de langage, ne prêtons-nous pas à ce qui croît et vole et bondit notre propre désir de sens? D'anticiper? De raconter une histoire? Mots simples, questions complexes, qui subsistent au terme de ma lecture. Questions qui m'interpellent. Courts textes, invitation à la relecture, à y revenir, comme on peut le faire au bouquet de violettes qu'on prendrait le temps de saluer, chaque matin, au réveil. »
Claude R Blouin, romancier et nouvelliste, ancien professeur de cinéma japonais.

Sylvie Gendron : Ton chant m'a atteinte parce qu'il vibre au diapason de la compassion et de l'autocompassion qui t'animent et qui aiguillent, depuis tant d'années, ton si vivant regard. Il fait œuvre utile pour la vie et la survie du regard que nous portons à notre tour sur le monde et sur nous-mêmes. 

Helène Martinez : Le recueil nous offre, une fois de plus, l'expérience riche, profonde et si singulière à laquelle seule Nadine peut me donner accès: Merci d'écrire et de nous donner accès à ce chant des créatures...et au chant éploré des créatures humaines également. 

Un mot pour te dire que j’ai été profondément touché par ta poésie, sa clarté et sa pureté. Tu trouves les mots très simples pour dire le rapport aux animaux, aux plantes, aux arbres. Ces animaux, ces plantes, ces arbres sont aussi singuliers, aussi importants que des êtres humains. Rien de général ou d’abstrait, mais un lien vivant, évident avec eux. De l’écologie incarnée. Et cela est ressenti d’autant plus fortement par contraste avec la partie portant sur Beyrouth. Oui, le loup est un homme pour le loup. Pierre Bertrand 

CHANT DES CRÉATURES, le nouveau recueil de NADINE LTAIF sort en librairie aujourd’hui mardi, le 6 février 2024.
« Pour écrire un seul vers, disait Rainer Maria Rilke, il faut connaître les animaux, il faut sentir comment volent les oiseaux et savoir quel mouvement font les petites fleurs en s’ouvrant le matin.»
Le chant de la poète est au singulier, un seul pour toutes les créatures. C’est le chant retrouvé du vivant. Des vers concis, limpides; on les croirait écrits à la naissance du monde où cohabitaient le végétal, l’animal, l’humain. Les poèmes de Nadine chantent tout ce qui vit et ont mal pour tout ce qui souffre.
Hejer Charf 


Entrevue avec Lynda Dion sur CIBL (en deuxième heure, en première partie Yara El-Ghadban)
8 août 2024

Entrevue avec Aziz Farès sur Radio VM :
15 mars 2024 

Entrevue avec Claudine Bertrand sur Radio VM
5 mars 2024

vendredi 16 juin 2023

Rien de mon errance - Recension par Élise Lepage


Rien de mon errance, livre dans lequel Nadine Ltaif met en scène la figure d'exilés du pourtour méditerranéen, qu'il s'agisse cette fois-ci d'Ovide, de Dante, ou du " rire étouffé des enfants / avalés par des mers affamées ". Quelque part dans Montréal, " un mendiant est trouvé mort de froid ". Ses poches sont bourrées de pages froissées de manuscrits. La voix du narrateur s'emploie alors à déchiffrer cette " Ballade du mendiant ", errance à travers les pays et les âges. " Byzance n'est plus Venise s'est enrichie depuis Byzance n'était déjà plus quand Venise s'était enrichie " : derrière triomphe et décadence des empires,
Nadine Ltaif se concentre sur des voix individuelles
et universelles à la fois
" Je suis assis sur les marches d'une petite église. / J'ai quitté mon foyer. / J'ai erré dans les villes médiévales. / J'ai pour bagages des sacs de recyclage remplis de carnets de notes / de toute les couleurs. [...] / J'ai traversé les villes, les villages et j'ai traversé les siècles. " Constantinople, l'Adriatique, Tomes, " une Turquie ottomane ", Venise : tous ces noms font lever un imaginaire tout en contraste aux confins de l'Europe et du Proche-Orient ;
cet imaginaire évoque tout à la fois le magnétisme de l'ailleurs, les arts et sciences de civilisations exceptionnelles, mais aussi une histoire violente de guerres et de conquêtes,
et au présent " la longue histoire / de la migration des peuples " que constituent les colonnes de migrants aux frontières et ces navires surchargés de vies qui rêvent de terres promises à prix fort. " Les cris de l'enfer / ne sont pas ceux de l'au-delà, mais bien ceux d'ici-bas. "
En entrechoquant ces deux visions des cultures méditerranéennes, Ltaif conjugue avec justesse et sensibilité culture et barbarie, grandeurs et horreurs de l'humanité
" la victoire des forces occidentales menées par Venise contre les Turcs / Venise règne sur l'Adriatique / la peste frappe Venise un million de victimes / Et le peintre Le Titien. " Ces assemblages de mots, d'images expriment parfaitement ces aléas. En trouvant un équilibre qui lui permet d'échapper tant au misérabilisme qu'à un esthétisme qui serait aveugle aux réalités, la poète touche par la voix de son narrateur et les mots du mendiant : " La rue est ma prison et / mon espace de liberté [...] / Homeless je reste / dans l'extrême liberté / dans le dénuement / d'une branche en / hiver. " Il reste des secrets lorsqu'on referme ce livre, ceux que n'aura pas révélés " la boîte de nacre incrustée de Damas ", enterrée par le mendiant - très belle métaphore du livre de poèmes qui s'ouvre et confie ses " feuillets remplis / de sable / et d'encre noire ", mais ne livre pas toutes les clés.
Rien de mon errance est un magnifique et touchant recueil qui cultive juste ce qu'il faut de distance et de silence.

Elise Lepage, Rien de mon errance, éditions du Noroît, 2019.
Département d'études françaises
Université de Waterloo





 

samedi 25 février 2023

Vient de paraître en traduction arabe





Rula a fait un choix de poèmes parmi mes recueils 
 parus durant les vingt dernières années aux éditions Le Noroit. Il sont extraits des Métamorphoses d'Ishtar(1987), Entre les fleuves (1991), Ce que vous ne lirez pas (2010) et Hamra comme par hasard (2014). Ils représentent les différentes étapes de sa trajectoire poétique : les relations Orient-Occident, et l'exil du point de vue d'une femme qui a quitté le Liban durant la guerre civile et qui a trouvé un espace de paix et d'espoir au Canada (Québec). 

Elle a intitulé le livre « Kay tadom-el-bahr » « Pour enlacer la mer ». Merci à la charmante éditrice Hanady Shamout et les éditions Dar Abaad. Grande joie d’avoir vécu ce moment à Hamra, quartier de mon enfance à Beyrouth. 

Kay tadom el bahr (Pour enlacer la mer), choix de poèmes traduit en arabe par Rula Jurdi, aux éditions Dar Abaad ((Beyrouth) 2023.

Le livre est dédié à Lama Peyroles et Joëlle Arcache mes amies d’enfance.

Pour vous procurer le livre :
Version papier :

Version numérique :



Nadine Ltaif poète

Rula Jurdi traductrice du livre 


Rula Jurdi est professeure d'histoire islamique à l'Université McGill à Montréal. Ses publications portent sur l'histoire intellectuelle et socio-politique des sociétés Chiites, incluant des articles, des entrées encyclopédiques et deux livres, le dernier étant écrit en collaboration avec Malek Abisaab. Elle a publié un certain nombre de poèmes dans les journaux libanais, américains et iraquiens. Elle a traduit des poèmes arabe en anglais, incluant ceux de Khalil Hawi, Mahmoud Darwish et Talal Haydar. Son roman Al-Khathâfa (La densité) est publié chez Nelson éditeur (Beyrouth et Suède). Le roman tisse trois histoires de la guerre civile libanaise marquées par le déplacement, l'amour inassouvi et le dérisoire. Son recueil de poésie, Ghilaf al-Qalb (La Peau du Coeur) est publié en 2013 chez le même éditeur. Le deuxième recueil de poésie, Ka-Layla aw Ka-l’Mudun al-Khamsa (Comme Layla ou Comme les Cinq Villes) est publié en 2015 chez al-Farabi, Beyrouth. Elle a participé à de nombreux forums littéraires et culturels aux États-Unis et au Canada comme "Al-Andalus, mémoire de la Poésie arabe", à l'Université Yale (1991), la Littérature dans la Traduction et l'Histoire au Collège Skidmore (1996) et "La liberté de créer", par le Cénacle culturel Liban-Québec à Montréal (2013).
 




lundi 5 décembre 2022

Mïtra Vol. 6, automne 2022 , dédié en partie à Etel Adnan


Etel Adnan nous a quittés il y a un an. Quelques textes et poèmes de notre sixième numéro de Mïtra voudraient lui rendre hommage.

J’ai vécu dès mon enfance avec la conscience, gravée
en moi, que l’exil géographique n’est qu’un cadre pour
un exil plus profond et contre lequel on ne peut rien.
Etel Adnan, Voyage, guerre, exil, L’échoppe, 2020

« Pour qui écrit-on ? Et qu’est-ce que la peinture ? » Ce
sont les deux questions sur lesquelles Etel Adnan s’est
penchée dans son oeuvre de poète, de romancière et de
peintre, une oeuvre qui traverse le vingtième et les deux
premières décennies du vingt-et-unième siècles. Etel a
écrit dans trois langues : l’anglais, le français et
l’arabe. Elle a vécu au Liban, puis à Sausalito en Californie
où elle a fondé les éditions The Post-Apollo Press avec
son amie la sculpteure Simone Fattal, enfin à
Paris à Saint-Germain-des-Prés. Aux États-Unis, Etel a
enseigné la philosophie en s’inspirant des réflexions d’un
grand nombre d’artistes et d’écrivain.es.
Les personnes qui ont participé à ce numéro nous ont
envoyé des témoignages d’amitié pour Etel, des réflexions
sur son oeuvre et des poèmes inspirés par les thèmes qui
traversent ses livres. Plusieurs membres du Comité
Femmes du Centre québécois du P.E.N. international
ont discuté de l’oeuvre d’Etel Adnan durant leurs
réunions. Elles nous ont envoyé leurs poèmes.

Lecture en accès libre :  Mïtra 







lundi 17 octobre 2022

Le monde selon l’âne EO

 






Film du grand réalisateur Jerzy Skolimowski. Tourné à l'âge de 84 ans. Arrivé au sommet de son art, le réalisateur nous offre une lecture cinglante du monde : la vie d’un âne. Tout respire dans ce film. Respire, souffre, pleure et vit. L’impuissance de l’âne face aux crimes des humains. La souffrance qu’il subit. C’est le Candide dans le conte de Voltaire. Le paysage chez Skolinowski est un personnage en soi. Il est grandiose. C’est le plus beau film que j’ai vu au Festival du nouveau cinéma.

EO film par Jerzy Skolimowski, 88 min
Scénario : Ewa Piaskowska · Jerzy Skolimowski
Musique : Paweł Mykietyn
Avec Eo (joué par 6 ânes), Sandra Drzymalska, Tomasz Organek, Mateusz Kosciukiewicz et Isabelle Hupert.

vendredi 22 avril 2022

Les Olympiades de Jacques Audiard



La semaine dernière, nous avons vu les Olympiades de Jacques Audiard. Hejer m'informe que c’est le surnom du quartier du 13e arrondissement à Paris. Comment esquisser les relations amoureuses des jeunes d’aujourd’hui ? Ces jeunes qui ont dépassé les différences raciales. Il y est question de sexe, d’amour, de relations humaines, de jalousie. Pas de couleur de peau. Le cinéaste évoque subtilement les communautés chinoises, la communauté africaine, le quartier du 13e. Mais il ne filme pas le quartier de manière frontale. Il l’évoque, le suggère. Filmant le détail pour le tout. D’où sa poésie. Plus proche d’un Louis Malle que d’un Truffaut. Et pourtant, il rejette les comparaisons à la Nouvelle vague me dit Hejer. Les deux actrices principales sont remarquables : Noémie Merlant, brillante dans son rôle de peintre dans le film Portrait de la jeune fille en feu de Céline Sciamma, on la retrouve ici dans le rôle d’une jeune femme féministe qui vit mal sa sexualité et Lucie Zhang, émouvante, qui a reçu le César du meilleur espoir féminin cette année. Un nouvel acteur se démarque aussi c'est Makita Samba, qui tient le rôle principal masculin. 
Un film à voir pour comprendre la société française d’aujourd’hui. Une nouvelle génération issue des luttes antérieures pour l’émancipation des femmes et des hommes.














 

mercredi 13 avril 2022

Journal de cinéphile



DRIVE MY CAR de Ryusuke Hamaguchi 


11 février 

Avec l’ouverture des salles de cinéma, on s’est ruées mon amie Hejer et moi dans un film de Ryusuke Hamaguchi qui est une adaptation de la nouvelle du même nom de l’écrivain Haruki Murakami parue dans le recueil Des hommes sans femmes. Un régal de 3 heures. Réflexion sur le jeu de l’acteur, sur les œuvres de Beckett et de Tchekov, critique du Japon, etc.. si riche et profonde réflexion sur les relations amoureuses et de filiation. À voir absolument !


 LICORICE PIZZA de Paul Thomas Anderson


13 février

Pour assouvir notre soif du cinéma sur grand écran, le deuxième film vu est Licorice Pizza de Paul Thomas Anderson avec l'actrice Alana Haim, sacrée meilleure actrice aux Golden Globes 2022. Le casting de la famille d'Alana est sa propre famille. Une comédie dramatique qui critique la société américaine des années 70, les idées reçues, les relations amoureuses, la société de consommation, tout cela sur un ton léger. Réjouissante sortie de Valentin.



L'ÉVÉNEMENT d' Audrey Diwan


9 mars 

Hier, après une journée fort chargée, nous avons clôturé la journée du 8 mars au cinéma pour voir le film féministe L'Événement d' Audrey Diwan, à partir du roman d'Annie Ernaux. Le film raconte le chemin ardu d'une jeune adolescente dans les années soixante qui ne peut être maitre de son corps et choisit d'avorter clandestinement. C'est tellement fort ! Si bien filmé et joué par Anamaria Vartolomei. Pour comble d'émotion, des cris s'élèvent de la salle. Une spectatrice s'était évanouie dans la petite salle du cinéma Moderne. Heureusement elle a repris ses esprits et nous avons pu continuer le visionnement. À voir absolument ! 


 
OUISTREHAM d'Emmanuel Carrère


5 avril 

Vu la semaine dernière le film Ouistreham d'Emmanuel Carrère qui met en scène Juliette Binoche dans le rôle d'une écrivaine qui s'immisce dans le milieu des femmes de ménage afin d'enquêter et d'écrire son livre. À part son personnage, tous les autres rôles sont tenus par des non professionnels qui jouent leur propre rôle. Le film est adapté du récit Le Quai de Ouistreham de Florence Aubenas. Je le recommande !


samedi 26 mars 2022

Le filigrane de l’interrogativité dans l’écriture de Nadine Ltaif par Lucie Lequin





Dédié à l'estimable et regrettée Monique Bosco, le dernier recueil de Nadine Ltaif s'insère dans la tranquillité de l'absente, dédicataire qui ne lira pas ces textes, mais qui soutient le cœur des mots: «continue, continue, n'arrête pas, surtout pas, écris comme jamais tu n'as écrit, à pleine bouche. L'amour, comme l'écriture, comme la vie, tous les jours, côtoie la mort.»

«Entre vestige et disparition», voici le monde qui se perpétue, qui se maintient à contre-courant, pour la survivance de l'espoir et de l'émerveillement, même si la poète avoue: «Je suis / une douleur sans nom»! Journal de voyage, le recueil se recueille. Devant Goya ou Guernica: la guerre, la férocité. Voilà, c'est cela: «Le présent sera une suite / de petites violences / et de grandes douleurs / Les moments de paix / trouvés dans le jardin / de jasmins / de cyprès / de bougainvilliers / Ces moments de fusions / où l'art réussit / à vaincre les haines / raciales / où les grands de Tolède / et ceux d'Arabie / Quand juifs et musulmans / et chrétiens / brodent leurs efforts / Ils trouvent un chant / une pierre / un nouveau conte / à ciseler avec / amour.»

La poète émigre, franchit l'histoire comme l'Atlantique, cherche sa route et son lieu de terre et d'ancrage: «Voici les voyages / que nous offre l'écriture / des voyages immobiles / des traversées de cahiers / de bord et d'apparence.»

Poésie de la simplicité, du regard posé sur Montréal ou sur l'Inde, qui accueille les images porteuses d'une réflexion profonde sur le sens de la vie, du regret et de la détermination irrépressible qu'il faut pour se perpétuer.

La passion du présent

Sous une belle image de Marie Levasseur, sans doute trop inspirée par les inoubliables nageurs de Betty Goodwin, La déposition des chemins, de Nicholas Dawson, conjugue son chant d'amour pour Leo, dans les lointains du Sud, et un désir de réconcilier les tensions antinomiques imposées par l'exil. Et cet exil s'appelle aussi l'hiver et la neige (dont l'abus des termes entache la pertinence de plusieurs textes du livre!).

Le poète cherche appui dans le blanc létal, alors que «son corps est un désastre. [alors que] les chutes et les chants ne creusent / aucune crevasse». Car «partout la terre accueille les morts. / Partout le ciel les conserve». Tout comme Nadine Ltaif, il lui faut trouver le chemin d'une réconciliation qui fera fondre la gaine insensible qui risque de contraindre la tension vitale. Il est impératif de trouver «des noms / prêts à fondre en simples mots / devenus pierres et tombeaux». L'urgence est d'autant plus grande que l'espoir de s'accomplir dans l'espace urbain se fragilise avec la récurrence des images maritimes.

Le recueil aurait mérité d'être expurgé de ses redites et de quelques facilités métaphoriques. Mais on sent tout de même sourdre un besoin profond de reconquérir la langue, ici française et espagnole, afin de pétrir substantiellement une émotion à fleur de peau.


Hugues Corriveau, Le Devoir, 11 septembre 2010

***


ce qu'en dit Mélanie Collado dans Canadian Literature :

Dans Ce que vous ne lirez pas de Nadine Ltaif le voyage dans l’espace est indissociable du voyage dans le temps. Les lieux ne sont évoqués que dans leur rapport avec l’histoire ou l’attente. Que ce soit en Espagne, en Inde ou au Liban, les pierres des villes visitées sont imprégnées du passé. Elles gardent les traces des luttes et des fusions entre civilisations et elles témoignent du lourd héritage des haines raciales. Dans les poèmes de ce recueil, le souvenir des guerres l’emporte systématiquement sur la beauté des paysages et des structures. Quant à  l’écriture, elle est perçue comme un voyage immobile. Autre trace visible, bien qu’elle soit plus fragile, l’écriture est associée à  l’attente, au présent et à  Montréal. La poésie permet d’exprimer la perte et la souffrance d’un être écartelé entre l’Orient et l’Occident, entre le passé et le présent. Écrire, c’est un moyen de lutter contre le déséquilibre et de peindre le réel aussi bien que l’imaginaire. Écrire, c’est également pour l’auteure, l’occasion de s’adresser une dernière fois à  une poétesse disparue. Monique Bosco ne lira pas le livre de Ltaif, mais cette dernière peut quand même lui rendre hommage en revendiquant son influence. Continuer à  écrire c’est continuer à  avancer sur le chemin vers lequel Bosco l’a guidée et c’est perpétuer son souvenir, aussi douloureux soit-il.



Dans une étude parue dans le livre Écritures québécoises, inspirations orientales. Dialogues réinventé?
Lucie Lequin, professeure à l'Université Concordia, Montréal, traite des livres de Nadine Ltaif, surtout de Ce que vous ne lirez pas, dernier recueil de poèmes (éditions du Noroît, 2010).

« Le filigrane de l’interrogativité dans l’écriture de Nadine Ltaif » 
Lucie Lequin
Écritures québécoises, inspirations orientales. Dialogues réinventé
sous la direction de Janusz Przychoden
Presses de l’université Laval, 2013


(Extrait)
Pour la poète, il s’agit d’être prête lorsqu’il y a surgissement de la beauté qui est, et restera, nécessairement évanescente et fragile, il s’agit de saisir l’instant de beauté qui n’existe pas sans son contraire « Il y a le poids la lourdeur du crime […] un mal qui n’a pas connu sa rédemption / et qui pleure /de siècle en siècle » ...

Bien plus qu’un simple jeu avec les mots, l’écriture est un voyage dont la destination se trace au fil des pages, presque sans la poète : « Je cherchais la / beauté / j’ai trouvé / la guerre » ; l’écriture est « sans merci » ; c’est pourquoi « les questions restent / et me restent entre les mains » . Comme la poète se maintient disponible à la beauté, elle se maintient aussi disponible à l’incertitude et à l’insécurité, il y va de sa vie : « L’écriture est un acte dangereux. Mais en même temps. Si je n’écris pas, je suis en déséquilibre comme si l’écriture m’aidait à trouver l’équilibre. C’est une situation à double-tranchant. » 

Ce danger de l’écriture, Ltaif l’affronte au jour le jour pour dire la poésie et le réel dans lequel « l’humaine inhumanité »  est plongée. Les formes de déshumanisation peuvent varier, mais l’effet reste le même : l’incompréhension domine et tue; elle est « une zone dont nous ne sommes pas sûrs de sortir vivants. Haletants. Écorchés vifs de ce que nous voyons défiler devant nous : guerres, atrocités. Injustices. Le livre d’une histoire qui ne s’achève pas. » Cette histoire éternelle est celle des femmes assujetties, des petites gens, des jeunes désespérés, des gens sans place dans la société, des gens sans pouvoir. Son point de vue sur l’être souffrant se déplace – la souffrance n’est pas limitée à un territoire – et, ici et là, se fixe un moment durant lequel, avec une grande économie de mot, elle fait voir les êtres sans défense, déplacés en eux-mêmes, en exil du soi, en exil dans leur société : « Un homme en veston sort / d’un bosquet qui lui a servi / de maison d’un soir / en plein centre-ville […] Aux nouvelles un jeune de vingt et un ans / s’est enlevé la vie » De même, dans son hôtel en Inde, elle sent les femmes « Recluses, interdites, livrées à l’attente de leur roi » ; un instant, elle se réincarne faisant alors partie du harem « Il avait douze femmes / douze maharani / et j’étais l’une d’elles » . Une jeune mariée indienne, transgressant les règles lui « fait cadeau / de son visage » en se dévoilant. Ce geste, à jamais mystérieux, bouleverse la poète : « J’essaie de comprendre / mon malaise face/ à ce don du visage / de la jeune mariée /toute orange / toute voilée. »  Ces presque récits, ces portraits en miniature, ces instantanés creusent notre déshumanisation ordinaire et quotidienne, celle qui ne dérange plus. Qui s’émeut encore devant les sans abri, les suicidés, devant les femmes qui n’ont pas les mêmes droits que les Occidentales? Lorsqu’il y a émotion, elle est souvent de courte durée et est rarement suivie d’un geste. Le geste de Ltaif est celui de l’écrivaine qui plaide pour un retour à l’humanité tout en sachant qu’elle ne percera pas le mystère de la détresse humaine, réelle ou imaginée; son écriture est alors compassion et dénonciation : « je garde la sensation d’être passé par là / D’avoir vécu cette souffrance / La souffrance des pierres usées / par les siècles.  » 


Outre les douleurs plus intimes, des sans abri par exemple, Ltaif réfléchit aussi aux douleurs collectives, celles des femmes, mais aussi celle de son pays quitté : « ce monstre à mille têtes / toutes les religions réunies / qui s’entre-dévorent / silencieusement / quelles rancunes étouffées / gisent sous les cendres / prêtes à jaillir / des tombeaux » La guerre n’est donc pas finie. D’ailleurs, tant que les décideurs « cultivent la haine / La haine devient un arbre / aux racines profondes / qu’ils arrosent de sang » , la paix ne sera qu’illusion provisoire. Cette haine verticale et réticulaire adhère au régime spatial et temporel de Ltaif et son expansion, ici, littéralement tue. Sans trancher, sans se ranger d’un côté, Ltaif montre que les moments de paix ne se situent qu’en surface alors que la haine couve et s’amplifie souterrainement. Enfin, les faiseurs de guerre, les faiseurs d’idées restent en retrait de la mort « alors que d’autres meurent / à [leur] place / d’autres qui ne croient / nullement / à [leurs] entêtements / meurtriers. » 
Juxtaposé tout près de l’inhumanité, « Le devoir d’oubli » tente de retrouver le sens de l’humain : « Collectivement / on vit une douleur / et on a l’impression / de ne pas nous en sortir / Enlisés nous sommes / dans le fond du gouffre / de la négativité / J’essaie de comprendre / ce sentiment autodestructeur ». Au lieu de ressasser le mal subi, il faut arriver à s’en détacher dit la poète : « J’attendrai qu’elle [la douleur] passe / comme si elle n’était / plus en moi / et je la regarderai passer » . En conséquence, elle se tourne vers l’avenir : « Je ne veux plus repasser / par ce chemin rocailleux […] je ne veux plus retourner / trop de sel / dans ma mémoire / a grugé le portrait. » Elle se découvre libre « à l’intérieur d’un état de choses et face à cet état de choses » Les embûches restent, les chagrins, les mystères, mais dominent sa capacité d’« habiter le monde » : « Comme si l’espoir / était une obligation / une survie ».

Lucie Lequin
Université Concordia
2013

samedi 5 mars 2022

Les chemins de l'Humanité -entrevue

À l'émission Les chemins de l’Humanité (Radio Ville-Marie), la nouvelle émission d’Aziz Farès. J'ai eu la chance de m’entretenir avec Aziz Farès et revisiter mes premières inspirations : les Mille et une Nuits, l’apport de la traduction à l’écriture, la francophonie, la guerre, l’exil, et les voies du livre à venir. 

Cliquez sur le lien :

https://soundcloud.com/nadine-ltaif/les-chemins-de-lhumanite-aziz-fares-nadine-ltaif-20220304-0800-ep-08




mercredi 5 janvier 2022

Derrière le camion à vidange

 


C’est un hommage bien particulier que je m’apprête à écrire ce matin. Un après-midi de fin décembre, je conduisais vers ma maison, j’étais ralentie par un camion de vidange. D’abord agacée par le retard que je subissais, puis je fus soudain prise d'une attraction irrésistible et me mis à observer les deux préposés à l’entretien en pleine action. Deux jeunes hommes, un Noir et un Blanc, sportifs et musclés. Ils se lançaient les sacs de vidange tel un ballon devant un panier de basket-ball, visant le trou béant de l’abîme déchiqueteur. Je ne pouvais plus m’arrêter de les regarder, fascinée par leur plaisir partagé. Il y avait une telle symbiose entre les deux ! Un ballet, une danse, un pas de deux. Je souhaitais rester derrière eux, avancer à pas de tortue, pour prolonger ma contemplation de leur art du ramassage des déchets. Un vrai régal, je vous dis. Ces deux-là méritent la palme de la Ville de Montréal.


                             BONNE ANNÉE 2022 !

lundi 6 décembre 2021

La revue numérique multilingue Mïtra, Vol. 5, automne 2021


La revue numérique multilingue Mïtra, Vol. 5, automne 2021 vient de paraître.

Avec la participation de :

Ashekman 
Martine Audet 
Marie Joe Ayoub 
Hichem Ben Ammar 
François Blais 
Silvia Bonavero 
Sophie El Assaad 
George Franklin 
Mark Foss 
Flavia Garcia 
Ximena Gómez 
Marie-Christine Guité 
Nikolay Gumilyov 
Nour Hariri 
Rodolfo Häsler 
Mariam Janjelo 
Rula Jurdi 
Belal Khaled 
Cyntia Kraishati 
Siwar Masannat 
Selim Mawad 
Majib Mobarek 
Nofal Nayouf 
Pietro Taravacci 
Pilar Pastor 
Diane Régimbald 
Nelly Roffé 
Odelin Salmeron 
Bahia Shehab 
Howard Scott 
Myriam Soufy 
Rawʿaa Sunbol 
Claire Varin 


Les graffitis et murales des révolutions des pays arabes en Syrie, Palestine, Irak, Liban Égypte et Belgique. 

Bonne lecture !

Accès libre : 






Depuis le 31 août 2021, la revue est publié par l'OSBL (organisme à but non lucratif) Magazine culturel Mïtra. 

Conseil d'administration

Comité de rédaction de langue arabe : 
Rula Jurdi
Yasmine Haj
Zeina Hamawi

Comité de langue française : 
Nadine Ltaif
Gerardo Acerenza

Comité de langue anglaise :
Lisa Marchi
Rula Jurdi
Yasmine Haj

Comité de langue italienne :
Gerardo Acerenza
Lisa Marchi

Responsable du volet art visuel :
Yasmine Nachabe Taan

Responsable du volet entrevue :
Rula Jurdi

Responsable du volet essai :
Lucie Lequin

Mise en pages
Yasmine Haj

Administration du Magazine culturel Mïtra
Lucie Lequin






 

mercredi 17 novembre 2021

Femmes de parole, une nouvelle revue dans le paysage littéraire québécois

 

La naissance d’une nouvelle revue littéraire qui met en valeur l'écriture des femmes est un évènement à célébrer. Femmes de parole, fondée et dirigée par la poétesse Nancy R. Lange, vient de paraître. Sa mission est de rendre « visible » la voix des autrices et artistes femmes. Dans son introduction, Nancy R. Lange présente le premier numéro comme un engagement féministe pour lutter contre l’effacement du rôle de l’écriture des femmes dans l’espace de la littérature. Trois sections s’y trouvent : Une passerelle France-Québec, un hommage à Louky Bersianik et une section en mémoire aux femmes victimes de féminicide.
Dans la première partie, on découvre les poèmes des autrices françaises et québécoises qui explorent dans un deuxième texte les liens qui les unissent à d’autres poétesses. Cécile Oumhani (que j’ai eu le bonheur de rencontrer lors d’un colloque à l’Unesco en juin 2008) nous parle de Brigitte Gyr. Ensuite viennent, jumelées, Brigitte Gyr/Françoise Hán, Marie-Hélène Montpetit/Nicole Brossard, Nicole Brossard/Anne Hébert, Sophie Brassart/Hélène Fresnel, Hélène Fresnel/Vénus Khoury-Ghata, Mäelle Dupon/Claudine Bertrand et Claudine Bertrand/Louky Bersianik.
La deuxième partie est un hommage à une figure incontournable de l’écriture et l’innovation dans le langage : Louky Bersianik, qui nous a quittés il y a exactement dix ans en décembre 2011. Louky Bersianik s’est nourrie de mythologie grecque, de figures féminines qu’elle met en scène dans ses livres phares : Le Pique-nique sur l’Acropole* ou le magistral L'Euguélionne : roman triptyque.** Dans ce numéro, nous retrouvons sa voix dans les extraits des lettres envoyées à l’Abeille, le surnom donné affectueusement à son amie Claire Varin, romancière et essayiste. La quête de l’antiquité y est vibrante : « La mythologie est pour moi une source intarissable d’émerveillement parce que ses histoires sont vraies tout en ayant l’air invraisemblables… ». Son « inventivité langagière » comme le mentionne Claire Varin a fait d’elle une avant-gardiste de l’écriture contemporaine des femmes. *** 

Louky Bersianik a donné à la poète Claudine Bertrand « l’impulsion nécessaire pour créer la revue Arcade (25 ans d'existence), lieu d’expression où la parole des femmes est prise en compte en tant que sujet non plus hors-sujet ».

J’aimerais ajouter que Maïr Verthuy, professeure émérite et première directrice de l’Institut Simone de Beauvoir à l’Université Concordia a enseigné l’œuvre de Louky Bersianik dans son corpus des écrits des femmes. La cinéaste Hejer Charf lui a consacré un film Autour de Maïr **** où elle donne la parole aux écrivaines québécoises, françaises et issues de la francophonie. Maïr Verthuy y raconte comment elle avait incité le traducteur Howard Scott, alors son étudiant, à traduire vers l’anglais L’Euguélionne. La traduction avait remporté le prix du Gouverneur Général en 1997.****

La troisième section, ajoutée exceptionnellement, m’a émue particulièrement. Elle donne à des poètes femmes et hommes la possibilité d’imaginer un moment heureux dans la vie de douze femmes assassinées en leur dédiant un poème. Écrits souvent à la première personne, elles/ils offrent une ultime reconnaissance gravée sur la stèle imaginaire de la disparue.

Je me nomme Lisette et aujourd’hui 
je me suis levée j’ai attrapé le jour 
Lisette par Caterine Godin 

         Je m’appelle Zoleikha 
         et je parle la langue des nuages 
         Zoleikha par Odelin Salmeron 


J’emprunte vos fêtes 
Quand je bouscule la nuit 
Dyann par Mireille Cliche [ … ]

Lors du lancement du premier numéro de la revue Femmes de parole à la librairie Martin à Laval, l’artiste Claire Aubin qui a sculpté le buste de Louky Bersianik, et qui a créé les magnifiques visuels jumelés à des extraits dans la revue, était une des invitées. Après que des membres de l'UNEQ ont rejeté la candidature de Louky à titre de membre d’honneur, raconte Claire Aubin, l’organisme a accepté par la suite d’héberger la statue de bronze dans ses locaux. Claire Aubin a aussi réalisé des bustes de Gabrielle Roy, Marie Uguay et des dessins pour des livres de France Théorêt. 

En attendant la suite déjà prévue dans le deuxième numéro: un hommage à Anne Hébert qui vient tout juste de paraître. D’autres hommages (ou femmages selon l’expression forgée par Maïr Verthuy) à d’autres figures du féminisme en littérature sont attendus. Nous souhaitons un long et riche parcours à Femmes de parole et à Nancy R. Lange qui porte le projet avec enthousiasme et une belle énergie positive. 


 *Le Pique-nique sur l’Acropole, Montréal, VLB éditeur, 1979, 235 p. Réédition : Montréal, L'Hexagone, (comprend une préface de Claudine Potvin), 1992, 238 p. 

 **L'Euguélionne : roman triptyque, Montréal, La Presse, 1976, 399 p. Réédition : Paris, Hachette-Littérature, 1978 / Réédition : Montréal, Stanké, collection Québec 10/10 (comprend des extraits de la critique et un texte inédit de l'auteure : « Un roman qui n'en est pas un », 1985, 412 p. / Réédition : Typo, 2012, 736 p. 

 ***Rappelons qu’un spectacle organisé et inspiré par Aimée Dandois-Paradis a été présenté en mai 2012 à la salle du Gesù. Des extraits de la correspondance entre Louky Bersianik et Claire Varin, avec un accompagnement musical du fils de Louky, Nicolas Bernianik-Letarte. 

 **** Autour de Maïr film documentaire d’Hejer Charf (2015) a pris l’affiche à la salle Saint-André-des-arts à Paris. http://www.hejercharf.com/Nadja_productions/Autour_de_Mair.html 

 *****La traduction anglaise de Howard Scott est parue en 1996 sous le titre The Euguelion , chez Alter Ego Editions.

Pour se procurer la revue : https://femmesdeparole.org/