samedi 20 janvier 2024

Chant des créatures de Nadine Ltaif




EN LIBRAIRIE LE 6 FÉVRIER 2024 
Le 4 août 2020, une explosion inouïe dans le port de Beyrouth cause des milliers de morts et de blessé·es, détruisant toute matière vivante en un souffle. Comment se reconstruire à partir de ruines ? Que résiste-t-il dans les souterrains de la mort ? Dans Chant des créatures, la poète libano-québécoise Nadine Ltaif trouve réparation dans l’écoute de la nature et des êtres vivants qui se défendent sans voix. En hommage au poème « Cantique des créatures » de saint François d’Assise, le recueil s’adresse aux arbres et aux oiseaux comme des adelphes de l’humanité, créant un herbier où dialoguent les plantes du Liban avec les fleurs sauvages du Québec. 

Une oeuvre de Pamela D. Stewart en couverture 

Salon du livre de Québec 12 avril de 15h à 16h et 13 avril de 11h à 12h.
Salon du livre de l’Outaouais pour une signature le 24 février de 11h-12h et le 25 février de 13h-14h.

En France le livre est disponible à la librairie du Québec, 
39 rue Gay Lussac, Paris 5 

https://lenoroit.com/poetes/nadine-ltaif/ https://lenoroit.com/produit/chant-des-creatures/



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La vie sous terre revoit le jour. Les fourmis – longtemps
confinées – ressortent et viennent me saluer de leurs antennes
– Moi – la géante – gargantuesque – bienveillante. Elles savent
que je suis une des leurs – et ne leur ferai aucun mal.
J’attrape le soleil entre mes deux mains comme une balle de feu
je suis prête à bondir – les piles rechargées.
Rien n’a encore poussé autour de moi.
La vie souterraine s’active en secret.
Les chiens – fous de bonheur – arrachent les bras de leur maître.
Les derniers froids fondent au soleil.

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LE TOIT DU MONDE
Le Toit du monde se réveille. Déjà les oiseaux discutent de l’état de la planète
une brise fraîche revigore
les fleurs qui attendent leur dose de lumière.
Le ciel bleu tranquille
les hirondelles crient leur désarroi.


Lettres Québécoises no 193 été 2024




Le Devoir, 10 février 2024
Il faut relire Le cantique des créatures de saint François d’Assise, auquel Nadine Ltaif se réfère expressément, pour mieux saisir la compassion présente dans ses textes. Bien avant le témoignage de sa colère et ce qu’elle pourrait engendrer de dure plaie à l’âme, la poète aime, s’immisce dans le coeur du vivant, entre les oiseaux et les fleurs. Cela peut sembler bien loin de la tragédie de l’explosion dans le port de Beyrouth, qui, pourtant, est le centre révolté de cette oeuvre. « Comment survivre à l’horreur ? » C’est justement à travers cet appel à la nature que la poète trouve l’espoir : « Nous serons frères et soeur à la manière / de saint François », dit-elle, et c’est comme lui, dans son Cantique, qui se donne « par l’air et le nuage et le ciel serein et tout temps ». Ltaif, devant la tragédie, se transforme : « Ce jour-là, j’ai décidé de / me défaire de ma peau / pour devenir vivante […] // Sans faculté de jugement moral — / pour retrouver le goût sauvage / du vent et le bruit / qu’il fait dans les arbres. » Son écriture est belle et efficace.
Hugues Corriveau
Chant des créatures
★★★
Nadine Ltaif, Éditions du Noroît, Montréal, 2024, 88 pages
« Nadine Ltaif, au Noroît, publie Le chant des créatures. Ce recueil de poésie, qui pourrait tout aussi bien relever du recueil d'essais poétiques, nous convie à un exercice spirituel de détachement de la seule humanité pour retrouver un tant soi peu ce par quoi nous participons de la faune, plus souvent ailée, et de la flore, telle qu'une citadine peut en cultiver la présence. C'est pourtant l'évocation d'un Cerf entraperçu qui, à mon sens, me communique le mieux ce processus thérapeutique d'un esprit blessé par l'éloignement du pays, le souvenir de gens meurtris ou la pensée qu'ils le soient. Mais le temps d'attention porté à des plantes ou au passage d'oiseaux réitère cette occasion de donner une chance à ce qui s'affirme vivant alors même que des pensées de désastre, de stupeur devant la violence humaine, de blessures diverses pourraient vous transformer en mort.e vivant.e. Mais c'est bien l'espérance humaine de l'auteure que je discerne dans cette manière d'accueillir l'araignée sur sa toile comme une artiste/proie possible, guettant la possible présence d'un prédateur plutôt que comme la prédatrice fonçant sur sa proie emmêlée dans les fils de soie. Bien humaine cette convocation de divers textes souvent haïkus, dont l'un de poète préféré, Issa, et, pour le titre, à un écrit de Saint-François. En mots simples, Nadine Ltaif nous convie à respecter la complexité de ce qui se dit en un regard avec une bête, un toucher avec une plante. Se rappeler que le souffle passe, au moment même où la peur et la peine semblent nous vouer à disparaître. Réapprendre à être au contact de ce qui vit, le regarder comme s'il nous envoyait des signes: mais ne projetons-nous pas nous-mêmes sur ce qui se meut notre propre besoin de langage, ne prêtons-nous pas à ce qui croît et vole et bondit notre propre désir de sens? D'anticiper? De raconter une histoire? Mots simples, questions complexes, qui subsistent au terme de ma lecture. Questions qui m'interpellent. Courts textes, invitation à la relecture, à y revenir, comme on peut le faire au bouquet de violettes qu'on prendrait le temps de saluer, chaque matin, au réveil. »
Claude R Blouin, romancier et nouvelliste, ancien professeur de cinéma japonais.

Sylvie Gendron : Ton chant m'a atteinte parce qu'il vibre au diapason de la compassion et de l'autocompassion qui t'animent et qui aiguillent, depuis tant d'années, ton si vivant regard. Il fait œuvre utile pour la vie et la survie du regard que nous portons à notre tour sur le monde et sur nous-mêmes. 

Helène Martinez : Le recueil nous offre, une fois de plus, l'expérience riche, profonde et si singulière à laquelle seule Nadine peut me donner accès: Merci d'écrire et de nous donner accès à ce chant des créatures...et au chant éploré des créatures humaines également. 

Un mot pour te dire que j’ai été profondément touché par ta poésie, sa clarté et sa pureté. Tu trouves les mots très simples pour dire le rapport aux animaux, aux plantes, aux arbres. Ces animaux, ces plantes, ces arbres sont aussi singuliers, aussi importants que des êtres humains. Rien de général ou d’abstrait, mais un lien vivant, évident avec eux. De l’écologie incarnée. Et cela est ressenti d’autant plus fortement par contraste avec la partie portant sur Beyrouth. Oui, le loup est un homme pour le loup. Pierre Bertrand 

CHANT DES CRÉATURES, le nouveau recueil de NADINE LTAIF sort en librairie aujourd’hui mardi, le 6 février 2024.
« Pour écrire un seul vers, disait Rainer Maria Rilke, il faut connaître les animaux, il faut sentir comment volent les oiseaux et savoir quel mouvement font les petites fleurs en s’ouvrant le matin.»
Le chant de la poète est au singulier, un seul pour toutes les créatures. C’est le chant retrouvé du vivant. Des vers concis, limpides; on les croirait écrits à la naissance du monde où cohabitaient le végétal, l’animal, l’humain. Les poèmes de Nadine chantent tout ce qui vit et ont mal pour tout ce qui souffre.
Hejer Charf 


Entrevue avec Lynda Dion sur CIBL (en deuxième heure, en première partie Yara El-Ghadban)
8 août 2024

Entrevue avec Aziz Farès sur Radio VM :
15 mars 2024 

Entrevue avec Claudine Bertrand sur Radio VM
5 mars 2024

vendredi 16 juin 2023

Rien de mon errance - Recension par Élise Lepage


Rien de mon errance, livre dans lequel Nadine Ltaif met en scène la figure d'exilés du pourtour méditerranéen, qu'il s'agisse cette fois-ci d'Ovide, de Dante, ou du " rire étouffé des enfants / avalés par des mers affamées ". Quelque part dans Montréal, " un mendiant est trouvé mort de froid ". Ses poches sont bourrées de pages froissées de manuscrits. La voix du narrateur s'emploie alors à déchiffrer cette " Ballade du mendiant ", errance à travers les pays et les âges. " Byzance n'est plus Venise s'est enrichie depuis Byzance n'était déjà plus quand Venise s'était enrichie " : derrière triomphe et décadence des empires,
Nadine Ltaif se concentre sur des voix individuelles
et universelles à la fois
" Je suis assis sur les marches d'une petite église. / J'ai quitté mon foyer. / J'ai erré dans les villes médiévales. / J'ai pour bagages des sacs de recyclage remplis de carnets de notes / de toute les couleurs. [...] / J'ai traversé les villes, les villages et j'ai traversé les siècles. " Constantinople, l'Adriatique, Tomes, " une Turquie ottomane ", Venise : tous ces noms font lever un imaginaire tout en contraste aux confins de l'Europe et du Proche-Orient ;
cet imaginaire évoque tout à la fois le magnétisme de l'ailleurs, les arts et sciences de civilisations exceptionnelles, mais aussi une histoire violente de guerres et de conquêtes,
et au présent " la longue histoire / de la migration des peuples " que constituent les colonnes de migrants aux frontières et ces navires surchargés de vies qui rêvent de terres promises à prix fort. " Les cris de l'enfer / ne sont pas ceux de l'au-delà, mais bien ceux d'ici-bas. "
En entrechoquant ces deux visions des cultures méditerranéennes, Ltaif conjugue avec justesse et sensibilité culture et barbarie, grandeurs et horreurs de l'humanité
" la victoire des forces occidentales menées par Venise contre les Turcs / Venise règne sur l'Adriatique / la peste frappe Venise un million de victimes / Et le peintre Le Titien. " Ces assemblages de mots, d'images expriment parfaitement ces aléas. En trouvant un équilibre qui lui permet d'échapper tant au misérabilisme qu'à un esthétisme qui serait aveugle aux réalités, la poète touche par la voix de son narrateur et les mots du mendiant : " La rue est ma prison et / mon espace de liberté [...] / Homeless je reste / dans l'extrême liberté / dans le dénuement / d'une branche en / hiver. " Il reste des secrets lorsqu'on referme ce livre, ceux que n'aura pas révélés " la boîte de nacre incrustée de Damas ", enterrée par le mendiant - très belle métaphore du livre de poèmes qui s'ouvre et confie ses " feuillets remplis / de sable / et d'encre noire ", mais ne livre pas toutes les clés.
Rien de mon errance est un magnifique et touchant recueil qui cultive juste ce qu'il faut de distance et de silence.

Elise Lepage, Rien de mon errance, éditions du Noroît, 2019.
Département d'études françaises
Université de Waterloo





 

samedi 25 février 2023

Vient de paraître en traduction arabe





Rula a fait un choix de poèmes parmi mes recueils 
 parus durant les vingt dernières années aux éditions Le Noroit. Il sont extraits des Métamorphoses d'Ishtar(1987), Entre les fleuves (1991), Ce que vous ne lirez pas (2010) et Hamra comme par hasard (2014). Ils représentent les différentes étapes de sa trajectoire poétique : les relations Orient-Occident, et l'exil du point de vue d'une femme qui a quitté le Liban durant la guerre civile et qui a trouvé un espace de paix et d'espoir au Canada (Québec). 

Elle a intitulé le livre « Kay tadom-el-bahr » « Pour enlacer la mer ». Merci à la charmante éditrice Hanady Shamout et les éditions Dar Abaad. Grande joie d’avoir vécu ce moment à Hamra, quartier de mon enfance à Beyrouth. 

Kay tadom el bahr (Pour enlacer la mer), choix de poèmes traduit en arabe par Rula Jurdi, aux éditions Dar Abaad ((Beyrouth) 2023.

Le livre est dédié à Lama Peyroles et Joëlle Arcache mes amies d’enfance.

Pour vous procurer le livre :
Version papier :

Version numérique :



Nadine Ltaif poète

Rula Jurdi traductrice du livre 


Rula Jurdi est professeure d'histoire islamique à l'Université McGill à Montréal. Ses publications portent sur l'histoire intellectuelle et socio-politique des sociétés Chiites, incluant des articles, des entrées encyclopédiques et deux livres, le dernier étant écrit en collaboration avec Malek Abisaab. Elle a publié un certain nombre de poèmes dans les journaux libanais, américains et iraquiens. Elle a traduit des poèmes arabe en anglais, incluant ceux de Khalil Hawi, Mahmoud Darwish et Talal Haydar. Son roman Al-Khathâfa (La densité) est publié chez Nelson éditeur (Beyrouth et Suède). Le roman tisse trois histoires de la guerre civile libanaise marquées par le déplacement, l'amour inassouvi et le dérisoire. Son recueil de poésie, Ghilaf al-Qalb (La Peau du Coeur) est publié en 2013 chez le même éditeur. Le deuxième recueil de poésie, Ka-Layla aw Ka-l’Mudun al-Khamsa (Comme Layla ou Comme les Cinq Villes) est publié en 2015 chez al-Farabi, Beyrouth. Elle a participé à de nombreux forums littéraires et culturels aux États-Unis et au Canada comme "Al-Andalus, mémoire de la Poésie arabe", à l'Université Yale (1991), la Littérature dans la Traduction et l'Histoire au Collège Skidmore (1996) et "La liberté de créer", par le Cénacle culturel Liban-Québec à Montréal (2013).
 




lundi 5 décembre 2022

Mïtra Vol. 6, automne 2022 , dédié en partie à Etel Adnan


Etel Adnan nous a quittés il y a un an. Quelques textes et poèmes de notre sixième numéro de Mïtra voudraient lui rendre hommage.

J’ai vécu dès mon enfance avec la conscience, gravée
en moi, que l’exil géographique n’est qu’un cadre pour
un exil plus profond et contre lequel on ne peut rien.
Etel Adnan, Voyage, guerre, exil, L’échoppe, 2020

« Pour qui écrit-on ? Et qu’est-ce que la peinture ? » Ce
sont les deux questions sur lesquelles Etel Adnan s’est
penchée dans son oeuvre de poète, de romancière et de
peintre, une oeuvre qui traverse le vingtième et les deux
premières décennies du vingt-et-unième siècles. Etel a
écrit dans trois langues : l’anglais, le français et
l’arabe. Elle a vécu au Liban, puis à Sausalito en Californie
où elle a fondé les éditions The Post-Apollo Press avec
son amie la sculpteure Simone Fattal, enfin à
Paris à Saint-Germain-des-Prés. Aux États-Unis, Etel a
enseigné la philosophie en s’inspirant des réflexions d’un
grand nombre d’artistes et d’écrivain.es.
Les personnes qui ont participé à ce numéro nous ont
envoyé des témoignages d’amitié pour Etel, des réflexions
sur son oeuvre et des poèmes inspirés par les thèmes qui
traversent ses livres. Plusieurs membres du Comité
Femmes du Centre québécois du P.E.N. international
ont discuté de l’oeuvre d’Etel Adnan durant leurs
réunions. Elles nous ont envoyé leurs poèmes.

Lecture en accès libre :  Mïtra 







lundi 17 octobre 2022

Le monde selon l’âne EO

 






Film du grand réalisateur Jerzy Skolimowski. Tourné à l'âge de 84 ans. Arrivé au sommet de son art, le réalisateur nous offre une lecture cinglante du monde : la vie d’un âne. Tout respire dans ce film. Respire, souffre, pleure et vit. L’impuissance de l’âne face aux crimes des humains. La souffrance qu’il subit. C’est le Candide dans le conte de Voltaire. Le paysage chez Skolinowski est un personnage en soi. Il est grandiose. C’est le plus beau film que j’ai vu au Festival du nouveau cinéma.

EO film par Jerzy Skolimowski, 88 min
Scénario : Ewa Piaskowska · Jerzy Skolimowski
Musique : Paweł Mykietyn
Avec Eo (joué par 6 ânes), Sandra Drzymalska, Tomasz Organek, Mateusz Kosciukiewicz et Isabelle Hupert.

vendredi 22 avril 2022

Les Olympiades de Jacques Audiard



La semaine dernière, nous avons vu les Olympiades de Jacques Audiard. Hejer m'informe que c’est le surnom du quartier du 13e arrondissement à Paris. Comment esquisser les relations amoureuses des jeunes d’aujourd’hui ? Ces jeunes qui ont dépassé les différences raciales. Il y est question de sexe, d’amour, de relations humaines, de jalousie. Pas de couleur de peau. Le cinéaste évoque subtilement les communautés chinoises, la communauté africaine, le quartier du 13e. Mais il ne filme pas le quartier de manière frontale. Il l’évoque, le suggère. Filmant le détail pour le tout. D’où sa poésie. Plus proche d’un Louis Malle que d’un Truffaut. Et pourtant, il rejette les comparaisons à la Nouvelle vague me dit Hejer. Les deux actrices principales sont remarquables : Noémie Merlant, brillante dans son rôle de peintre dans le film Portrait de la jeune fille en feu de Céline Sciamma, on la retrouve ici dans le rôle d’une jeune femme féministe qui vit mal sa sexualité et Lucie Zhang, émouvante, qui a reçu le César du meilleur espoir féminin cette année. Un nouvel acteur se démarque aussi c'est Makita Samba, qui tient le rôle principal masculin. 
Un film à voir pour comprendre la société française d’aujourd’hui. Une nouvelle génération issue des luttes antérieures pour l’émancipation des femmes et des hommes.














 

Chant des créatures de Nadine Ltaif

EN LIBRAIRIE LE 6 FÉVRIER 2024  Le 4 août 2020, une explosion inouïe dans le port de Beyrouth cause des milliers de morts et de blessé·es, d...