vendredi 18 décembre 2020

Centre des arts de Stanstead - Poetry Focus on Zoom - December 12th, 2020 - N. Ltaif | K. Grubisic



Lien: https://youtu.be/eTv3OZjNO0Q 

Le lien vers la lecture-zoom du Centre d’art de Stanstead de Katia Grubisic et moi, avec une présentation de Diane Régimbald que je remercie de même que Sonia Patenaude et surtout Gabriel Safdie, directeur du Centre. 

Bonne écoute ! 

Hello, here is the link to the December 12th Poetry reading featuring Nadie Ltaif and Katia Grubisic.  You can also read the introduction by Madame Diane Régimbald.  

Mot d'introduction - Welcoming Remarks

Bonjour, je me présente, Diane Régimbald, j’ai le plaisir de faire la programmation du Focus Poésie sur zoom, avec Gabriel Safdie, directeur du Centre des arts de Stanstead et initiateur de ce Focus Poésie. 

On a le bonheur de présenter des lectures de poètes francophones et anglophones depuis septembre dernier. Aujourd’hui, nous en sommes à la 8e lecture. Nous écouterons les poètes Nadine Ltaif  et Katia Grubisic que je remercie chaleureusement pour avoir accepté mon invitation. Ce sont deux femmes engagées dans le milieu littéraire et culturel que j’estime beaucoup. 

Pour la petite anecdote, Nadine Ltaif et moi, nous sommes connues toutes deux dans les années 80 à l’Université de Montréal lors de nos études littéraires, juste avant qu’elle ne publie son premier recueil, Les métamorphoses d’Ishtar. Une de nos professeurs, romancière et poète, a marqué le parcours de chacune : Monique Bosco. Nadine a codirigé, en 2017, un livre hommage à cette femme exceptionnelle avec Claire Varin, intitulé, Avec Monique Bosco. Elle codirige aussi la revue d’art et de littérature multilingue en ligne, Mïtra, qui vient justement de lancer son 4e numéro.  

Quant à Katia Grubisic, je l’ai connu en 2011, lors de notre participation à Livres comme l’air, événement du Centre québécois du PEN, d’Amnistie Canada et de l’Uneq, où nous étions jumelés à des écrivains, journalistes, blogueurs, de différents pays du monde, emprisonnés pour leurs idées, leurs actions sociales et où nous devions leur dédicacer l’un de nos livres. Par la suite, j’ai toujours revu Katia, femme pleine de dynamisme et de curiosité dans différents contextes, de traductions, de lectures et d’animation. Elle a entre autres animé le Atwater Poetry Project à la bibliothèque Atwater de 2009 à 2013. 

Je laisse la parole à l’animatrice Sonia Patenaude qui vous les présentera plus en détail.

lundi 14 décembre 2020

Un an Anna que tu es partie par Nadine Ltaif

Un an Anna que tu es partie

par Nadine Ltaif

Je t’ai vue Anna Karina, pour la première fois, quand ton avion atterrissait à Montréal en automne 2004, en compagnie de Katerine et de son ami Philippe Eveno. Le trio venait pour un tournée de spectacles produits par mon amie  Hejer Charf, cinéaste. Elle a toujours eu des projets surprenants. Au retour de Bilbao, après avoir assisté à un festival qui te rendait hommage, Hejer me déclare  « J'ai invité Anna Karina et Katerine pour une tournée de chansons au Québec ». Elle trouvait tout à fait normal de produire aussi des spectacles de musique. 

Pourquoi pas !

J’embarquais dans l’aventure. Je te rencontrais donc pour la première fois, Anna, toi qui vivais une nouvelle étape de ta vie, tu venais de lancer le CD Une Histoire d’Amour avec Katerine. J’assumais le rôle d’assistante d’Hejer qui a filmé les concerts réalisant un film émouvant : Anna Karina au Québec. On voyait combien tu étais heureuse quand tu chantais et combien vous vous amusiez pendant les répétitions.

Hejer a le don de pousser les êtres à se surpasser et leur insuffle une énergie créatrice. Elle t’encourage à écrire ton deuxième scénario de film et tu nous l’as dicté par téléphone de Paris. Tu t’inspirais des spectacles et de ton aventure au Québec pour imaginer un road-movie qui met en scène une productrice de spectacles amnésique qui cherche à retrouver sa mémoire en invitant deux chanteurs à se produire sur les scènes québécoises à travers la province.

Anna tu nous as apprivoisées et une amitié est née. Tu joues alors le rôle de Victoria, la productrice dans le film qui va porter le titre éponyme. Katerine et Philippe Eveno devaient jouer les rôles des deux chanteurs. Woodson Louis, qui avait été chauffeur lors des spectacles, et qui est un acteur d’origine haïtienne, va alors tenir le rôle d'homme de confiance de Victoria dans le film. 

Mais Katerine venait de sortir son tube « J’adore » et ne pouvait plus tenir le rôle principal dans ton film. Le film était sur le point d’avorter. Hejer, en femme de parole que rien n’arrête, décide alors de poursuivre l’aventure en engageant un acteur et un chanteur québécois dans les rôles de Katerine et d’Eveno. Voilà comment est né le film Victoria. C’est une histoire d’amour. Un amour maternel. La quête d’une mère qui cherche son enfant perdu, sauvé d’un avortement. Nous avons beaucoup ri, Anna tu t’es beaucoup amusée sur le tournage du film. Une amitié se scellait de plus en plus. Les paysages québécois déferlaient dans le road- movie que nous tournions. Tu voulais que ce soit au rythme des méthodes de la Nouvelles Vague, de façon artisanale.

Une affection s’était installée. Je me souviens des dîners chez toi, la cuisine que tu aimais faire, la recette de la vinaigrette à la moutarde que tu m’avais donnée. Je retiens toujours ton conseil : si le filet-mignon est trop cher, tu peux toujours acheter la pointe de surlonge qui fait tout aussi bien.

Je me souviens des après-midi à Paris, les voyages à New York et à Florence, reçues très chaleureusement par les directrices Paola Paoli et Maresa D’Arcangelo du Festival International des films de femmes; tant de doux moments partagés, et, jusqu’aujourd’hui, alors que nous sommes à la veille de ton année, je ne peux réaliser que tu n’es plus. J’ose à peine penser à la douleur de notre ami Dennis Berry, ton mari, et de Katerine.

La dernière fois que nous nous sommes vues, on a passé l’après-midi à la terrasse du Chai de l’Abbaye à Paris à parler de poèmes. Tu venais de lire mon dernier recueil. 

Où es-tu Anna ? Où… sinon dans la mémoire de la pellicule, celle de la Nouvelle Vague, de Godard, ou bien dans les paroles de tes chansons de film, ou en duo avec Katerine. 

Suis-moi jusqu'au bout de la nuit

Jusqu'au bout de ma folie

Laisse le temps, oublie demain

Oublie tout ne pense plus à rien.

(Ne dis rien

chanson de Gainsbourg) 

Ton voyage Anna n’est pas fini… Il continue.



Nadine, Anna, Hejer - photo: Dennis Berry 


lundi 16 novembre 2020

Deux lectures du Rire de l'eau par Nadine Ltaif


 

Invitée à lire deux extraits du recueil Le rire de l’eau (aux éditions du Noroît, 2004) dans la chaîne youtube du poète Indran Amirthayagam, «Ces vers dont les moments de silence sont la respiration des poèmes et leur souffle: une ouverture pour assister la chute des murs qui sépare les cultures et les identités."   




Scènes de Carthage : 

https://www.youtube.com/watch?v=w4kZyER6H4A&feature=share&fbclid=IwAR2yLeNotjb9Jnc-JtOsy5tkQM0oa82Sm74ZNMrRPWJDHpKY25bthmKRjQU







Le rire de l'eau : 
https://www.youtube.com/watch?v=XAOn5_R04ao&feature=share&fbclid=IwAR1Y99-RYi62c_QcIGcLKcjffCwmVFe3G8Gf7kt_2jKoHkOxjJDBo0VyuBQ

dimanche 15 novembre 2020

Je m'appelle humain, réalisé par Kim O'Bomsawin sur la poète Joséphine Bacon

Je viens de regarder le film Je m'appelle humain, réalisé par Kim O'Bomsawin, sur la poète Joséphine Bacon. Et je suis habitée par ce film. Par le Silence qu'il impose. Le Vide qu'il creuse en nous. L'émotion qui s'en dégage. La présence de Joséphine qui relate sa vie. La tisse sur les récits de ses ancêtres, de ses parents. Son voyage vers son passé, retour sur les terres de son enfance, de sa naissance. Les mots innus, les noms des terres oubliées, Les noms oubliés, effacés. Je suis émue par la présence de son accompagnatrice, la poète Marie-Andrée Gill, de la poète Laure Morali. De la générosité de leur écoute. Les archives de Montréal des années 50, années de l'arrivée de Joséphine. Les extraits de films qu'elle a réalisés alors que toute sa vie elle a voulu faire parler ses aînés. Leur donner la parole. Leur faire retrouver la parole. Je m'arrête parce que j'aimerais que vous voyez ce film le plus tôt possible. Un film d'une grande poésie comme les poèmes de Joséphine Bacon. (Merci Mémoire d'encrier qui a publié les poèmes de Joséphine Bacon !!)

Au Cinéma Moderne




jeudi 12 novembre 2020

Rien de mon errance de Nadine Ltaif, lecture par Nelly Roffé

 



Rien de mon errance de Nadine Ltaif, éditions du Noroît, 2019

Lecture par Nelly Roffé


photo par Hejer Charf






Le dernier recueil de Nadine Ltaif doit son titre au poème de Thierry Metz cité dans le Manuscrit  2.

…...Pour me percher au plus haut du jour.

Avoir ce puits où me pencher. Mais

même là-haut

je ne perds rien de mon errance......


Deux voix se répondent, celle du Mendiant et celle du Narrateur dans un dialogue onirique qui nous emmène de Byzance à Venise, passe par la Turquie, la Syrie, le Liban, s'arrête à Montréal pour convoquer la dureté de l'hiver et la souffrance des Autochtones.


Le thème principal est l'exil. Dans notre actualité si cruelle, n'importe qui peut être jeté hors de chez soi « comme une ordure » sans avoir commis de crime. Des villes entières sont effacées de la carte, il n'y a qu'à penser à la Syrie ainsi le narrateur s'adressant au lecteur : « mais tu verras toujours le dessin de Damas incrusté dans la pierre, la Syrie ne quittera pas ta mémoire. »


Le rôle du poète est de montrer la voie et surtout, ne pas rompre la chaîne, habiter les mondes, faire des ramifications.

Il ne reste au mendiant expulsé de la Cité que des carnets à remplir, sa mémoire ne faillit pas. Nadine Ltaif lui fait prendre la figure des exilés politiques de la littérature passée et présente : Ovide, Dante mais aussi Mandelstam, Gibran, Nazim Hikmet .

Elle cite ce dernier : « Les racines de ma poésie se trouvent sous la terre de mon pays ». Et plus loin : « Elles s'étendent en ramifications et s'orientent dans tous les pays du monde. »

Écrire un poème de la filiation consiste à hériter d'un ancien poète qui lui-même a hérité d'un autre et ainsi de suite.


Le recueil nous fait descendre aux sources retrouver les siècles, les époques, il recrée une histoire dialoguée à rebours : temps des empires, temps des invasions, temps des pillages, temps des commerçants vendeurs d'exilés.

On  parlera ici d'un conte poétique polyphonique aux voix multiples où le mendiant, autrefois riche commerçant confie sa détresse dans ses carnets, narre les malheurs du monde dans ses feuillets « remplis d'encre noire » alors que les cris des mouettes déchirent le ciel et que résonnent les hurlements de l'enfer. Ses rêves de Méditerranée se sont évanouis. Il aurait tant voulu refaire naître le miracle du bonheur.


Jusqu'à quand aura duré le calvaire du pauvre mendiant ? Dans cette ville nordique où il s'est exilé, il appuie ses vieux os contre un arbre à qui il relate ses traumatismes. Des êtres aimés à jamais disparus,

des peuples qu'il a connus qui se sont entretués sans vainqueurs ni vaincus, des terres offertes, pillées, abusées. Il racontera son histoire aux fourmis, habitants de l'arbre qui l'écouteront en silence.


Avalés par les mers affamées, Nadine Ltaif interroge notre monde, le sort que nous réservons aux « migrants », à tous les déplacés qui aspiraient à une vie meilleure. Elle leur prête sa voix, prête à se dépouiller pour les aider.


Le recueil se termine par une lettre d'un père à son fils, elle est dédiée à Sherif, le frère de la poétesse. Il vient clore l'épopée onirique et s'incarne dans un événement réel : au lieu de vouloir la mort car plus rien ne l'anime, le père conseille le fils : Dépouille-toi de tout, deviens mendiant, va aider autrui, le vieillard et l'enfant, alors tu pourras mourir en paix. 


Je salue la belle écriture de ce recueil de poèmes divisé en cinq parties, cinq manuscrits retrouvés . Il a la qualité de s'inscrire dans la tradition des grands écrivains passés et présents qui ont confronté le monde, l'ont parcouru et se sont prosternés en toute humilité devant la misère du monde comme pour dire à tous les déplacé que nous sommes, vous n'êtes pas seuls , nous témoignerons pour vous.



Commentaire de lecture de Caude R. Blouin :

Ça se présente sous une couverture où un dessin de songeuse la montre, yeux bien ouverts, se laissant imprégner de ce qui vient du fond de son histoire. Ça s'écrit au je masculin, comme si un écrivain masculin avait voulu pour s'assurer de rejoindre l'humain commun s'imaginer elle; ça vole du Moyen Orient à Venise à Montréal; ça se réclame d'Ovide, Gibran et Zweig, discrètement; ça parle de la richesse intérieure et des pauvretés que l'on associe aux richesses conventionnellement désignées telles; ça dit l'exil; ça dit les passages de victoires à défaites et les aveuglements successifs des empires; ça dit ce qu'interroge en nous tout mendiant, pour peu que l'on se sente errant; ça s'appelle RIEN DE MON ERRANCE, c'est de Nadine Ltaif, éd. Noroît.

Claude R. Blouin 


Pour se procurer le livre ou le PDF: 


https://www.leslibraires.ca/livres/je-ne-perds-rien-de-mon-nadine-ltaif-9782897661694.html


vendredi 28 août 2020

Les Métamorphoses d'Ishtar relecture

 Paru une première fois en 1987, réédité deux fois 1988 et 2008. Je l’ai relu suite à l’explosion du 4 août dans le port de Beyrouth. Je n’aurai pas su le crier aujourd’hui tant ma tristesse est grande. #editiondunoroit #Guernicaeditions

André Marquis dans Lettres québécoises :

À l'instar d'Ishtar

Y a-t-il quelque chose de plus difficile que de faire référence dans un recueil de poésie à l'actualité politique mondiale, que de parler du Liban et de l'Ethiopie, de la guerre et de la famine? La culpabilité, la morale, le larmoiement, voilà autant de récifs! À ma très grande surprise, Nadine Ltaif a su éviter tous ces pièges et elle nous présente un livre bien structuré, d'une ampleur et d'une force insoupçonnées. Par le biais de la légende, du conte et du mythe, elle parvient à construire un ouvrage crédible qui a le mérite d'insérer tous les éléments

référentiels nécessaires, sans pour autant agacer le lecteur. Elle développe l'univers métaphorique à un point tel qu'il constitue une gigantesque allégorie.

Ishtar, dans les religions anciennes de l'Asie antérieure, représente la déesse de la fécondité et des combats, tandis que, chez les Phéniciens, elle correspond à l'Aphrodite grecque. Le livre reproduit une semblable évolution, puisque l'auteure insiste d'abord sur les horreurs de la guerre pour déployer, par

la suite, un sensualisme féminin. Les titres des diverses parties rendent compte de ce cheminement: «Lettre à l'Oie des Mille et une nuits», «Histoire du Chameau», «Les Sirènes», «Ishtar» et «Fleur de Grenade».

Dans Les Métamorphoses d'Isthar, les animaux prennent la parole, si bien que leurs discours dépassent aisément les frontières qu'élèvent entre eux les êtres humains. Par ses références aux Mille et une nuits et aux Contes de ma mère l'Oye, Ltaif donne le ton à son récit où se multiplient les superbes strophes sans que le charme ne cesse d'opérer: "Mais comment vous avouer que mon inspiration vient d'ailleurs, que je ne suis pas d'ici, même si j'aime un loup à Montréal, que ma langue vient d'ailleurs, que l'écriture est d'ailleurs, que mon rythme à moi n'est pas celui de l'hiver, mais que ma passion pour vous méfait changer de langue, et je parle et raconte, comme une femme arabe à une autre femme arabe, comme une oie à une paonne hospitalière, raconte et raconte les malheurs et les malheurs, et ma frayeur des fils d'Adam, (p. 33)"

La narratrice n'oublie jamais son passé, taché de sang, qui s'étale rouge dans sa mémoire.

Lettres québécoise, no 48, Hiver 1987-1988.



Sur les Métamorphoses d’Ishtar


En reprenant les deux premiers titres de l'auteure, se trouve souligner l'apport de l'auteure à ce qu'on a appelé l'écriture migrante qui émergeait dans les années 80. Dans Les Métamorphoses d'Ishtar, le mythe côtoie l'autobiographie d'une manière sensible et pertinente. Le mythe du Phénix est intimement liée à celui d''Ishtar dans la poésie de Ltaif. En évoquant le destin majestueux de cet oiseau, la poète retrace ses propres expériences douloureuses tout en gardant à l''esprit l''exemple merveilleux de l''aboutissement glorieux de toute souffrance.Entre les fleuves (finaliste du prix Émile-Nelligan) marque le retour du sentiment de l''exil qui est, comme d''habitude, lucidement observé par la poète dont l''imagination poétique l''emporte encore une fois dans la mythologie méditerranéenne pour dénicher un nouveau mythe qui puisse soulager son moi déraciné. Le mythe d'Hécate inspire l'élan créateur de Ltaif en composant son deuxième recueil.


" Après une enfance et une adolescence passée au Liban, pays de ses parents, Nadine Ltaif s’installe à Montréal en 1980. Exerçant dans le cinéma indépendant, elle est assistante de Hejer Charf pour le film canadien Les Passeurs (2003)… Elle enracine, sans l’y enfermer, son écriture dans le Moyen-Orient. Dès son premier recueil, Les Métamorphoses d’Ishtar, traduit en anglais en 2011, elle entremêle ses différentes cultures. Elle consent à son exil, mais refuse de s’y être emprisonnée. Dans sa quête insatiable de la vie, elle se méfie de toute pensée rigide et préfère opter pour une éthique de l’incertain. Aux pays de l’enfance et à celui de l’adoption, elle préfère un « hors-lieu » fertile, où rien n’est prédéterminé, où l’inédit est encore possible et où le paradoxe trouve une résolution fragile et éphémère. Son recueil Ce que vous ne lirez pas (2010), très épuré, illustre la manière dont, sans discours, la poétesse reste fidèle à son rêve de combattre  « l’humaine inhumanité » bien qu’elle sache que le paradis est à jamais perdu. Dans sa quête. « interminée » et interminable, d’une compréhension de soi et de ses différentes cultures, elle entretient cette posture interrogative, qui lui permet un certain émerveillement d’être, si fugace soit-il. Son écriture se veut outil, de déplacement du sens, nourriture pour son aspiration à a beauté et arme contre le mal afin que l’enfer n’occupe pas tout l’espace."

Dictionnaire universel des Créatrices, Éditions des femmes, 2015

Entrée Nadine Ltaif (poétesse libanaise) par Lucie Lequin















mercredi 6 mai 2020

LES RÉFUGIÉS DU CHEMIN ROXHAM d’Hejer Charf

LES RÉFUGIÉS DU CHEMIN ROXHAM d’Hejer Charf en accès libre.
Avec un poème de Nadine Ltaif.

Présenté à la Foire d’art contemporain, Cité internationale des arts, Paris, octobre 2019. L’oeuvre est représentée par la Galerie Arnaud Lefebvre, Paris 6.
95 % des migrants qui entrent irrégulièrement au canada prennent le chemin Roxham, un petit chemin forestier entre l’État de New York et le Québec.

https://vimeo.com/371441942
Lire article de Hejer Charf dans Médiapart
#JeMeSouviendrais




vendredi 3 janvier 2020

L'esprit de famille de François Beaune

La situation dramatique au Liban m'a poussée à m'intéresser plus particulièrement aux mentalités et aux structures sociales de ce pays. Quand je réussis à me rendre à une librairie, je tombe sur un livre de François Beaume, L'esprit de famille. 77 positions libanaises (Élyzad, 2018). Vendetta, clanisme, mafia, " C'est la famille qui est l'État au Liban, comme en Sicile". 
Invité par la Maison des Écrivains de Beyrouth (Bayt el-Kottab), l'auteur va s'intéresser à tout ce qui fait que les Libanais en sont arrivés à cette désastreuse paralysie qui sévit au pays aujourd'hui.  Et c'est bien au noyau de base qui forge la vie des Libanais, qu'il s'attaque : le noyau familial. La famille dicte tout à son enfant : " Je vais te dire, pour moi Afifé, ce que c'est, la famille ! La famille, c'est violent...le bébé tu te le fais kidnapper pendant un mois par ta mère, les soeurs, toutes les cousines....Pendant un mois ton enfant est pour les autres. " (il me semble avoir déjà vécu ça).

Le mérite de ce livre est qu'il représente un document, comme un documentaire, il n'aborde pas la question par des généralités. On peut enfin mettre des mots sur les maux des Libanais. Je répète : comment en sont-ils arrivés là ! C'est par les voix individuelles, que nous apparait le portrait de la société libanaise, dans sa diversité, ses appartenances religieuses et ses classes sociales. 

Plusieurs sujets sont traités : les réfugiés syriens, les immigrés libanais en Afrique et à travers le monde, toujours à partir d'exemples de personnes rencontrées. François Beaune raconte tout. Tantôt avec humour, ironie, mais toujours avec humanité.

Le clou du bouquin est la 39ième "position". La 39ième personne rencontrée, c'est Perla, l'écrivain réussit à l'esquisser, en imitant son accent, son attitude, son burlesque; et la lectrice que je suis ne peut se retenir de rire de plaisir : "En fait ce que j'adore c'est les sports d'adrénaline, les sports extrêmes, le zipline à Hawaï, je fais Jane Tarzan, ...Je fais des tiramisus meilleurs qu'en Italie." Le ton est donné.

En lisant le livre de Beaune, j'ai pensé à Sélim Abou*, bien connu pour ses recherches en anthropologie. L'auteur site par ailleurs La République des cousins de Germaine Tillon, spécialiste du Maghreb. 
Plus loin il écrit : "La famille et les communautés, c'est vraiment un des drames de ce pays. Ce sont deux mécanismes qui empêchent la formation d'un État de droit". 

Oui il y a beaucoup à dire sur les droits humains, des femmes, et des homosexuels, dans notre beau pays. Encore faut-il qu'ils existent ! Les mentalités, ce sont elles qui dictent nos comportements et agissent sur nous inconsciemment. Ils nous faut beaucoup de bonne volonté et de bonne foi pour s'en détacher et les contrôler avant qu'elles ne nous contrôlent. 

Un livre à lire pour apporter un éclairage de plus sur ce que nous vivons aujourd'hui au Liban. 

* Sélim Abou, L'identité culturelle. Relations interéthniques et problèmes d'acculturation, éditions Perrin.

L'esprit de famille. 77 positions libanaises, François Beaune, Éditions Elyzad, 2018




  

Chant des créatures de Nadine Ltaif

EN LIBRAIRIE LE 6 FÉVRIER 2024  Le 4 août 2020, une explosion inouïe dans le port de Beyrouth cause des milliers de morts et de blessé·es, d...