« J’ai appris à nier ce que l’on ne peut nommer. Sans mot rien n’existe, tu comprends ? » À partir de cette affirmation, Nina Bouraoui va déconstruire les mythes autour des questions sensibles telles que l’homosexualité et le racisme. Du non-dit de la mère à la naissance à l’écriture de la fille, et donc à la prise en charge des mots qui doivent être dits, on assiste dans ce nouveau livre de Nina Bouraoui à une révolte assumée, un combat féministe. Un courage admirable, pour affirmer son désir de femme, algérienne et française, qui affronte un monde d’hommes. À partir de la blessure de la mère : l’épisode de sa mère qui rentre à la maison avec ses vêtements déchirés, dans une Algérie des années soixante-dix, où les harcèlements dans les rues, annonçaient déjà les années sanglantes à venir, l’auteure transportera en elle cette blessure, cette douleur, et une culpabilité que j’essaie encore de comprendre. Elle écrit tout au long du récit, qu’elle veut « se faire pardonner une faute ». La faute d’être différente. Est-ce que sa grand-mère française finira par l’aimer avec sa part d’Algérienne ? On assiste à certaines scènes cruelles de racisme : « - Ça parle français à la maison ? » lui demandera-t-on en voyant son nom. C’est une quête absolue d’être aimée dans sa différence. Cela me fait réfléchir à une question fondamentale à savoir s’il est plus gratifiant, après tout, d’aimer ou d’être aimée. Un livre à lire et relire pour l’authenticité de la démarche comme tous les autres livres de Nina Bouraoui.
Tous les hommes désirent naturellement savoir, Nina Bouraoui, Éditions Jean-Claude Lattès, 2018, 264p.
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